Un extrait d’un message évoquant les célébrations du cinquantenaire de l’ENM, communiqué aux auditeurs de la promo 2007 par leurs délégués :
"L’anniversaire a duré 2 jours. La première matinée était consacrée aux discours sur l’ENM de Jean-François Thony, Vincent Lamanda, Jean-Louis Nadal, Robert Badinter et quelques magistrats retraités issus des premières promos du CNEJ (ancêtre de l’ENM, avant 1970). L’après-midi s’est tenue une conférence sur la justice internationale et son influence, et le 2e jour était consacré à diverses visites.
Le moment le plus intéressant à relater est la première matinée, qui a ressemblé à une grand-messe vantant les qualités de l’école, mais pas seulement : V. Lamanda et J.L. Nadal se sont exprimés en filigrane sur certaines questions d’actualité et notamment deux d’entre elles : l’idée d’une formation commune aux magistrats et aux avocats (rapport Darrois), et l’unité du corps judiciaire (l’affaire Medvedyev devant la Cour EDH ).
Tous deux ont rappelé leur attachement à l’unité de la profession de magistrat, qui doit commencer par une formation commune aux parquetiers et aux juges. L’école remplit ce rôle en scellant le principe de l’unité du corps judiciaire.
Pour Jean-Louis Nadal, l’école doit adapter la formation aux évolutions de la justice, ce qu’elle a su faire jusque-là , par exemple en renforçant le brassage avec les avocats. L’idée d’une école du droit formant les juges, les procureurs et les avocats aboutirait à supprimer l’école et serait une fausse solution. Juger et requérir sont de vrais métiers, ce n’est pas seulement une affaire d’expérience de vie et de maturité certes indispensables, c’est aussi une exigence d’un très haut niveau de compétences. Vincent Lamanda a aussi rappelé que l’école doit continuer à former des magistrats généralistes.
Robert Badinter a clôturé la première matinée par un discours dans lequel il a affirmé que l’unité du corps judiciaire ne pouvait admettre la dualité des statuts, plaidant en faveur de garanties statutaires identiques pour les parquetiers et les juges.
Sur la formation, il a défendu l’idée d’une culture commune aux magistrats et aux avocats, avant que les voies ne se séparent, une école de la magistrature étant légitime et nécessaire. Il ne semble pas opposé à un début de formation commun aux futurs magistrats et avocats, qui achèveraient leur formation en se spécialisant.
Il a terminé son intervention en se disant las des lamentations relatives à la justice en France et en ajoutant que nous n’avons pas à rougir de la justice française. Nous avons raison d’en être fiers même si elle n’est pas parfaite. Et son mot de la fin : « les jeunes magistrats ont bien de la chance, et nous leur souhaitons bonne chance ».
Jean-François Thony a essayé d’être rassurant sur les aspects contestés de la réforme de l’an dernier. Il a aussi défendu l’école en exprimant un avis défavorable à une formation commune des professions judiciaires, en rappelant que l’ENM est un modèle à l’étranger et que l’allongement du stage avocat à 6 mois permet déjà d’apprendre à travailler ensemble.
Ce qui nous a déçus, c’est l’absence de débat sur la question de l’école aujourd’hui, notamment avec le public.
L’école avait invité Jean-Daniel Lévy, directeur-adjoint de CSA opinion, pour faire un bilan de l’image de la justice en France. Il a indiqué que 6 Français sur 10 disent avoir une bonne opinion de la justice, envers laquelle ils sont plus critiques qu’à l’égard des services de santé, de police, de l’éducation et de l’armée. Le taux de satisfaction est meilleur pour les Français qui ont été confrontés à la justice (!). Aux yeux des Français, l’affaire d’Outreau serait la conséquence de comportements individuels et non d’un dysfonctionnement global de l’institution.
La "table ronde" avec les magistrats des premières promos du CNEJ, même si elle n’en avait que le nom puisqu’il s’agissait d’interventions sans échanges, a permis à V. Lamanda, J.L. Nadal et aux anciens de parler de leurs expériences individuelles. L’un de ces anciens combattants a indiqué qu’il était procureur militaire en Algérie pendant la guerre où il jugeait les actes de rébellion... ce qui nous a fait réfléchir à la chance que nous avions d’exercer ce métier dans la France de 2009, nous demander si nous aurions voulu le faire il y a quelques décennies et ce que nous ferions demain dans une telle situation.
Pour les festivités, une plaque de métal rappelant la déclaration des droits de l’homme entre le parvis de l’école et le palais de justice a été inaugurée."
Les délégués de la promotion 2007 Julien Savoye et Joëlle Canton
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