Voilà quelques nouvelles fraîches du Texas.
Ces dernières semaines ont vu le monde judiciaire américain trembler à plusieurs reprises devant l’ampleur des scandales disciplinaires touchant certains de ses magistrats. L’Etat du Texas a été bien servi avec des mises en causes au plus haut niveau de la hiérarchie. Voici un petit florilège des cas les plus frappants.
Pour quelques dollars de plus…
La première affaire nous conduit en Pennsylvanie où deux juges ont reconnu avoir touché à eux deux 2,6 millions de dollars de « rétro-commissions » pour envoyer des adolescents dans des centres de détention pour mineurs, depuis 2002. Les deux magistrats ont en effet commencé par faire fermer la prison pour mineurs publique et ont ensuite confié leurs jeunes délinquants à des centres privés, moyennant intéressement sur les subventions payées par l’Etat aux-dits centres. Ils ont fait leur mea culpa et plaidé coupable. N’empêche qu’en regardant au cas par cas, les autorités se sont aperçues que bon nombre de très jeunes adolescents avaient été ainsi placés pour des infractions mineures qui ne méritaient pas un tel traitement. Par exemple, une lycéenne ayant moqué son principal adjoint en rédigeant une page Myspace bidon a passé trois mois en détention pour harcèlement… Ca ne rigolait plus au tribunal pour enfant ! Les deux juges risquent de passer les 87 prochains mois en prison (ce qui représente probablement beaucoup moins que la somme des peines imméritées qu’ils ont infligées) et ont démissionné de leurs fonctions et du barreau.
Après l’heure c’est plus l’heure…
Retour au Texas. Sharon Keller, la très républicaine présidente de la Court of Criminal Appeals (cour suprême pour les affaires pénales au Texas), surnommée « killer-keller » en raison de son objectivité dans les affaires de peine capitale, vient d’être mise en accusation par la commission sur les conduites judiciaires du Texas, pour son comportement dans le cadre d’un recours en suspension d’une exécution. Le matin du 25 septembre 2007, la Cour Suprême des Etats-Unis admettait un recours concernant la légalité de l’exécution par injection létale. Cette décision devait marquer le début d’une sorte de moratoire de fait des exécutions de près d’un an, y compris au Texas, dans l’attente de la décision au fond. Sauf que ce jour là , une exécution était prévue à Hunstville. Les avocats du condamné à mort s’étaient donc dépêchés de rédiger leur recours. Mais vers 15 heures, panique : le système informatique du cabinet avait intégralement grillé. Les avocats avaient alors appelé la Cour pour demander de ne pas fermer le greffe à 17 heures mais de rester ouvert une demi-heure supplémentaire pour avoir le temps de générer une nouvelle motion. Justice Keller avait insisté pour que le greffe ferme à 17 heures, sans consulter les autres juges de la cour, et malgré la présence d’un juge de permanence chargé spécialement de statuer sur les demandes de suspension tardives. Les avocats avaient donc trouvé portes closes quand ils s’étaient présenté pour leur recours entre 17 heures et 17 heures 30, et leur client avait été exécuté. Pour la petite histoire, le juge de permanence était resté ce soir là jusqu’à tard dans l’attente du recours et avait même pré-rédigé sa décision… Justice Keller a choisi de se défendre bec et ongles. Elle risque son poste à la tête de la cour.
L’abus de médicaments peut rendre raciste…
Il n’y a pas que les juges qui sont concernés par cette vague de scandales. Récemment, Chuch Rosenthal, l’ancien District Attorney de Houston, surnommé « Mr Exécution », ultra-républicain, ultra-conservateur et chrétien très religieux, a été poussé à la démission suite à la découverte d’une série d’e-mails à caractère pornographique et raciste sur son ordinateur. Sur ces derniers, on pouvait notamment le voir donner l’ordre à ses subordonnés d’empêcher tout « canadien » (terme argotique désuet pour désigner les noirs) dans un jury. Il faut dire que la discrimination contre les minorités dans la sélection des jurés est de longue date un problème au Texas (la Cour Suprême a condamné l’Etat à plusieurs reprises).. Une théorie soutient que les noirs, les mexicains, les juifs, les gros et les femmes en général ont tendance à s’identifier à l’accusé. C’est pourquoi un manuel (officiel) du parquet de Dallas des années 60 et 70 donnait ordre aux substituts d’audiences de les éjecter des jurys autant que possible.. Dans les années 2000, les agissements de Mr Rosenthal ont paru plus choquants au grand public. Mais celui-ci a mis au point une défense surprenante : il soutient qu’il prenait au moment des faits un traitement composé d’une combinaison inadéquate de médicaments, ce qui aurait eu l’effet secondaire gênant « d’altérer son jugement » et donc de le rendre raciste et misogyne. Avis aux médecins des racistes contemporains…
Une affaire de mœurs pour finir :
Enfin, cette semaine, un juge de Galvenston (Sud de Houston) a plaidé coupable face aux accusations d’agressions sexuelles sur deux de ses subordonnées et obstacle au fonctionnement de la justice. Il encourt 20 ans d’emprisonnement mais le parquet n’en a requis que 3. Ce juge était également reconnu pour son caractère exécrable et son attitude humiliante envers les avocats, notamment dans les affaires de peine capitale.
Voilà qui clôt notre tour des manquements à la discipline et à la déontologie.
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