C’est l’histoire d’un texte, qui n’avait l’air de rien. En 10 mots et 5 nombres, beaucoup de choses risquent de changer pour le suivi des personnes condamnées.
C’est l’histoire d’un texte qui a un nom barbare : CL249. Seuls les grands fans du #DirectAN auront relevé son ascendant généalogique : CL249, c’est l’amendement 249 de la commission des lois. Je vous parle de la réforme pénale dont la discussion s’ouvre aujourd’hui à l’Assemblée nationale.
CL249 n’est pas moins barbare quand on le lit :
"Les 1°, 3° et 18° de l’article 132-45 du code pénal sont supprimés."
Cette fois, ce sont les juristes pénalistes qui commencent à s’alerter.
L’amendement vise notamment à supprimer deux des obligations les plus fréquentes du sursis avec mise à l’épreuve : l’obligation de travail et l’obligation de soins. L’obligation de travail vise à favoriser la réinsertion professionnelle des condamnés en les incitant à justifier de démarches de recherches d’emploi ou de formation, ou de leur activité. L’obligation de soins intéresse pour sa part un autre type de délinquance, celle des personnes qui souffrent de problèmes divers, qu’ils soient alcoolique, toxicologique ou psychologique. Ce sont deux des obligations les plus fréquemment prononcées par les juridictions dans le cadre des mises à l’épreuve qui doivent ainsi être supprimées.
Le raisonnement est simple (et rusé) : dès lors que la contrainte pénale est étendue à tous les délits, en supprimant les obligations de travail et de soins de la mise à l’épreuve, on incite fortement les juridictions à se saisir de la contrainte pénale, en tout cas si elles souhaitent continuer à prononcer ce type d’obligations. Or, comme les juridictions sont moins fétichistes de la mise à l’épreuve, qu’attachées au sens des peines prononcées, elles seront conduites à employer plus souvent, et même quasi exclusivement, la contrainte pénale. Le calcul est éminemment politicien. Cependant les conséquences de ce simple amendement sont multiples.
En effet, si CL249 ne vise qu’à supprimer trois obligations (dont deux essentielles) de la mise à l’épreuve, le même texte sert de base à de multiples autres mesures. Ainsi, ces obligations peuvent être prononcées dans le cadre d’un aménagement de peine en semi-liberté ou sous surveillance électronique, d’un sursis avec obligation d’accomplir un travail d’intérêt général, d’un suivi socio-judiciaire, ou dans l’accompagnement des condamnés qui bénéficient d’une suspension de leur peine. Toutes ces mesures se réfèrent aux obligations de la mise à l’épreuve, de sorte que modifier le texte principal a des conséquences multiples. Il fallait donc corriger cet effet indirect, ce que CL249 s’emploie à faire. Désormais, les obligations de ces mesures continueront à trouver leur référentiel dans la mise à l’épreuve, mais également dans la contrainte pénale, avec cette limite que ça ne concernera pas non plus toutes les obligations de la contrainte pénale !
Voilà donc l’histoire de CL249. A vouloir être stratégique, on rend juste la loi plus complexe et moins compréhensible.
Et c’est l’histoire d’un texte, que la commission des lois de l’Assemblée nationale a adopté en tout juste 40 secondes le 27 mai dernier.
Voici CL249, pour les lecteurs curieux :
http://www.assemblee-nationale.fr/1...
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